Ce jour-là, je me rendais paisiblement à la faculté de droit. Sur mon chemin, les voitures étaient nombreuses. Je révisais en marchant pour mon examen final car, comme à mon habitude, je ne révise qu’au dernier moment. J’étais tellement concentrée que je frôlais des gens et je traversais sans regarder.
À un moment, je percutai un individu hors du commun ; il avait un style et un gabarit qui m’intrigua. Je lui bafouillai des excuses, puis je n’y fis plus attention.
Dix minutes plus tard, j’étais devant l’université. J’y étais pour la énième fois en retard. En cours, je parcourus les rangs du regard et au 4ème rang je crus reconnaître l’individu que j’avais rencontré le matin même. Il commença à me dévisager. J’essayai de l’ignorer, je tentai de le mépriser mais cela n’était guère facile pour moi. Il me fixait de plus en plus avec ses grands yeux noirs. Il tenta même de se rapprocher de moi. Tellement l’effroi m’envahissait, je dus demander à sortir de cours. Cela m’angoissa au plus haut point. Ce n’est qu’à l’intercours que j’arrivai à l’oublier un peu.
Au cours suivant, qui avait lieu dans le tribunal situé à côté de l’établissement, nous devions poursuivre notre travail par groupe. Notre activité consistait à défendre un accusé. Nous décidâmes alors de chercher chacun de son côté sur quelle affaire pourrait porter notre intervention. Un peu plus tard, j’étais en train de défendre une personne comme tout le monde mais je le vis, là, debout, une main à la hanche, penché. Il était accusé de fixation sur une jeune demoiselle de mon âge. Au fur et à mesure de la préparation de sa défense, je commençais à le découvrir, il ne m’avait pas encore tout dit. Il apparut qu’il avait déjà commis des délits d’agressions sexuelles, ces actes n’avaient pas été punis car la victime avait retiré sa plainte pour une raison inconnue. Je décidai de ne pas finir l’instruction le jour même car il me restait encore quelques éléments de l’enquête à découvrir et une peur croissante et diffuse m’envahissait.
Le lendemain, j’allai rejoindre mon client au parloir, il m’apprit que c’était lui qui avait bel et bien agressé une étudiante. Il l’avait forcée à supprimer sa plainte à la police, la victime lui avait obéi car elle avait peur de lui. Quelques semaines après, l’affaire du monstre sordide avait redémarré. Le monstre avait été condamné à une peine de trois ans d’emprisonnement ferme.
À un moment, il me rappela que je l’avais percuté quelques jours auparavant ; Il me fit cette remarque pour me dire que tout le monde pouvait faire des erreurs, mais aussi pour me faire ingurgiter plus facilement ce qu’il allait m’apprendre. Il voulait me dire que lors de la délibération du juge, il s’était énervé. Je commençais à me demander qu’est qu’il avait fait, le stress m’empara. Il avait pris la juge par ses pieds pour ensuite la frapper contre les murs. Il avait voulu détruire son avocate. Elle avait tenté de se défendre mais sa violence l’en avait empêchée.
Abasourdie, je quittai précipitamment le tribunal abandonnant le monstre à ses gardiens. Je déambulais dans les rues comme une somnambule, la fièvre me brulait les joues. Je percutai brutalement un petit homme rond au crâne dégarni. Il s’écria :
« Mademoiselle R…, je suis bien aise de vous rencontrer. Cela fait trois semaines qu’on ne vous voit plus, ni à l’université, ni au tribunal ! Vos chances d’obtenir votre diplôme de fin d’études seront bientôt compromises. Ressaisissez-vous ! »